Triste cuivre

En passant devant l'enseigne clignotante d'un bar, sans l'intention d'y rentrer, la pluie se mît à tomber. Le trottoir ruisselait déjà lorsque j'eus ralenti la cadence de mes pas. J'hésitai un moment, mais l'idée de devoir continuer sous cette pluie battante, continuer à croire que je devais rentrer quelque part, me gonfla. Je me retournai doucement et le visage battu et trempé, j'eus l'impression que ma seule issue se situait pour ce soir derrière la porte vitrée de ce bar.

Une fois à l'intérieur, je compris que j'avais déjà pas mal reçu l'averse. Le cuir de mes chaussures s'était assombri, les mèches dans le cou dégoulinaient désagréablement et quelques frissons s'emparaient de mon corps. Le bar s'annonçait calme et la musique plaintive, comme ma ville, comme la vie. Les clients ne bavardaient pas vraiment. L'ambiance me plut énormément.

Deux instants plus tard, j'étais entièrement séché. Parce que le patron avait le goût du son, il avait en quelques morceaux cuivreux lifté mon être et abjuré mon mauvais sort.

Lavé et réchauffé durant cette fin de journée fade et normale. Peut-être souriant au fond de mon cyclone intime, peut-être l'œil brillant.