Arrêt imprévu ici dans une zone où le silence

Arrêt imprévu ici dans une zone où le silence vient du respect des cieux et de ses locataires. Rien ne veut perturber cette position subordonnée au divin. J'avoue presque y ressentir une oppression, une compression de notre droit d'exister. Pour vivre ici, il faut être vieux sans doute et si vous êtes jeune, votre vœu le plus cher est de partir ailleurs (c'est mon cliché évidemment). Heureusement, le soleil naturel de cette fin d'après-midi inonde les façades énormes de ces bâtiments consacrant la réserve et la soumission humaines et leur rend une beauté qu'ils méritent.

Je dois remplir deux heures dans cette petite ville pieuse. J'ai pensé aux venues pontificales, aux noms inscrits sur le marbre, aux vertus de la fontaine, aux enfants qui suivent leurs cours dans un établissement catholique à l'ombre du clocher de la basilique, à la platitude de l'océan quitté un peu plus tôt, à ma recherche d'un guichet automatique bancaire, à ces têtes d'avant qui ne ressemble en rien à la mienne. A vidanger ma vessie dans des toilettes publiques, à la tenue étrangement figée des gens, à la vétusté des enseignes et de leurs caractères typographiques. A beaucoup de choses pour éviter, puisque le lieu l'impose, de tomber dans une sorte de mélancolie et d'attirance pour le "meilleur".

Une blonde sortie de je ne sais quel monde et de sa Ford Fiesta rouge me lance un "bonjour" souriant. C'est presque étrange, car je ne trouve pas que cette action colle aux inquétudes, aux allures timides, aux saveurs du coin.